— Il sera doué, le petit, chuchote Arsile.
La marraine fée se penche sur le couffin pour mieux dévisager le poupon endormi. Elle passe une main dans les cheveux d’un noir profond. Le bébé fait une bulle de salive suivi d’un léger babillement.
— Mais qu’est-ce qu’elle fout, bon sang ?
Brifonde, l’autre fée présente, scrute d’un regard agacé une montre gousset agité de mouvements et de lueurs étranges.
— Tu connais Maglore.
— Hélas, oui. Bon, on va pas y passer la nuit, tant pis pour elle, on commence.
Dans un fracas heureusement seulement audible sur le plan féerique, Maglore apparaît au guidon d’une Harley-Davidson rutilante, encore dégoulinante d’étincelles magiques de toutes les couleurs.
— Salut les gonzes, ça pète ?
Arsile lui fait un vague signe de main, tandis que Brifonde lui lance un regard noir.
— Où t’étais fourrée, encore ? Tu empestes l’hydromel !
— Y’avait un congrès de… Fées, heu… Chaipus le sujet. On s’en fout, le buffet était d’enfer et c’était open-bar. Bon, elle est où, la crevette ? Faut se grouiller, j’ai rencard avec le chanteur du groupe Andruil’s Angels après.
L’imposante fée se cale maladroitement devant le couffin, titubant quelque peu. Elle baisse la tête, ayant des difficultés pour accommoder son regard sur le bambin.
— Aloooors… Hum, heu… Je lui donne le goût du brillant, du clinquant, du bling-bling. Et en bonus, une sacré libido pour la gente masculine. Elle va cartonner la gamine ! Bon, allez, je vous laisse terminer avec la princesse Machine, moi je me tire, je suis en retard. Bye, les copines !
Et, sans attendre, Maglore disparaît tout aussi brusquement.
Les deux fées échangent un regard consterné.
— On fait quoi, maintenant ?
— Ben, comme on peut pas contrer ce qu’a fait une collègue, on ne peut pas grand-chose, maintenant.
— Bon. Je lui donne l’art du spectacle. Ça ira de pair.
— Et moi le talent musical. On verra bien si ça corrigera suffisamment le tir…
16 mai 1919 : Naissance de Liberace, pianiste et showman américain.