— On pourrait s’enfuir.
Juliette défit les plis de sa jupe un peu froissée. Elle se mordilla la lèvre. Elle avait vu ce geste à la télé et le répétait sans le savoir. Elle hésitait.
— Mon frère m’a appris à conduire. On pourrait prendre la voiture et partir.
— Ça pourrait être dangereux.
Abdalla se pencha vers elle et lui prit la main, tout doucement. Son sourire la fit sourire elle aussi.
— Oui mais on se protégera.
— Et on ira où ?
Là Abdalla ne sut quoi répondre. Sa tata préférée habitait de l’autre côté de la mer. Ce fut le tour de Juliette de le rassurer :
— Le papa de Romain habite à Nantes et il est très sympa. Romain dit qu’il a une grande ferme, il y aura de la place pour nous !
Les deux enfants discutèrent encore de leur future évasion, cachés derrière le local poubelle, entre deux barres d’immeubles. Juliette avait acheté une boîte de petits beurres avec son argent de poche, et Abdalla avait demandé une canette de jus de fruit à sa mère. Cet endroit était leur palais. Mais il était devenu trop étroit.
Et surtout dangereux.
— Je comprends pas pourquoi j’ai pas le droit de te voir.
— Parce que les grands, ils y comprennent rien à l’amour.
30 juillet. Fête des Juliette et des Abdalla.