Napo était inconsolable. Dans quelques heures, il allait épouser la petite-fille de l’un de ses pires ennemis, juste pour avoir un peu la paix, et qui sait placer son hériter sur le trône d’un empire plus vaste que celui de Charlemagne.
Bien décidé à savoir une fois pour toute s’il devait franchir le pas, il alla consulter sa madame Soleil.
— Votre altesse, que me vaut le plaisir de votre visite… attendue.
— Puisque tu es voyante, tu sais déjà ce qui m’amène. Alors parle !
— Vous vous demandez si vous devez l’archiduchesse Marie-Louise. Alors je vais vous dire de le faire sans hésiter. La petite est à croquer, vous en serez totalement fou ! Et en plus, elle vous donnera un héritier.
— Je ne pourrais jamais aimer quelqu’un autant que ma chère Joséphine. J’ai dû divorcer, moi un Corse catholique, dont les parents sont toujours restés unis !
— Oui, enfin, votre altesse a quand même pas mal « chevauché » au cours des dernières années…
— Certes mais mon cœur n’appartenait qu’à Joséphine ! Et là, je dois épouser une Habsbourg ! Quelle déchéance !
Sur ces paroles, l’Empereur partit sans entendre les dernières paroles de madame Soleil…
— L’heure de ta déchéance n’est pas encore venue, petite Corse. Mais reviens me voir dans 4 ans, et on en reparlera…
2 avril 1810 : Napoléon épouse l’archiduchesse Marie-Louise
2 avril 1814 : déchéance de Napoléon
Gédéon
Le deux avril était autrefois un jour difficile. Les gens avaient alors l’habitude d’accrocher dans le dos des malheureux qui se laissaient surprendre de vrais poissons. Et pour qu’ils tiennent bien, ils les accrochaient avec des crochets de fer, qu’ils n’hésitaient pas à planter dans les chairs des malheureuses victimes. Souvent, les blessures s’infectaient, et le lendemain, donc le deux avril, on retrouvait de par les rues des cadavres exsangues, au dos desquels frétillait encore parfois un sandre, une carpe, un brochet ou un esturgeon. On rejetait à l’eau les poissons encore vivants, on accommodait les autres en matelote ou en bouillabaisse, et il fallait alors se débarrasser des corps. Ce fut la raison pour laquelle le Prince, un jour, prit un décret afin que les poissons vivants fussent remplacés par des figures découpées en papier. Le folklore y perdit beaucoup, et la cuisine locale aussi. Désormais, le deux avril, les gens sortaient avec des figures de papier mâché, et les restaurants y perdirent une grande partie de leur clientèle. Un chef renommé se passa l’épée à travers le corps, et un autre, bien moins côté, vint d’un espadon transpercer la poitrine du souverain. L’histoire se terminait donc un peu en queue de poisson, mais le papier resta. Ce ne fut que longtemps après qu’on remplaça les poissons découpés par des nuages de données. Ainsi va le monde, quand on cède aux sirènes de la modernité
Pierre Gévart