Thomas, l’air hébété, regarde distraitement le lieu où, deux jours auparavant, se tenait encore son échoppe.
Les paroles du mage lui reviennent en tête…
« Ainsi, tes trois souhaits sont qu’un feu inépuisable ronronne dans ton four, que ton travail soit tellement réputé que le roi demande tes produits, et naturellement que cela t’apporte la richesse. Tout cela, pour m’avoir rendu service, je te l’accorde, sous la forme d’un animal magique enfermé dans cette boîte de pyrophanite. Mets la boîte dans ton foyer et tes jours seront heureux, mais n’en dis jamais mot à quiconque et ne l’ouvre sous aucun prétexte, sinon le charme sera rompu ! »
Le vieil homme n’avait pas menti : sitôt la boîte dans l’âtre, plus besoin d’apporter de bois pour avoir une flamme continue. Et cette merveille lui permettait de cuire pains, tourtes et brioches, qui régalaient la capitale. Il ne fallut longtemps pour entendre tinter les écus, et bientôt le régisseur des cuisines de Charles II en personne passait commande dans sa boutique.
Et puis Rose arriva dans la boulangerie.
Elle était mignonne, avec son tablier et sa coiffe. Les clients l’aimaient bien, et son rire résonnait souvent dans Pudding Lane… Mais sa curiosité sur l’origine du feu devenait un problème pour Thomas. Après des mois de mutisme, il avait cédé en échange d’une faveur, et, en dégageant quelques cendres, lui avait dévoilé la boîte de pierre noire.
Ce qui s’est passé dans la nuit suivante, le boulanger ne le sait pas trop.
Voilà maintenant deux jours que tout Londres est en flammes, et rien ne semble pouvoir stopper la course de l’incendie.
Rose, la servante de la boulangerie de Thomas Farriner, n’a pas survécu à l’embrasement du bâtiment. On ne libère pas impunément une salamandre !
4 septembre 1666 : troisième et pire journée du « Grand incendie de Londres », qui détruisit plus de 13000 maisons et une centaine de bâtiments publics dont la cathédrale Saint-Paul.
Par Tangi Le Cadre