Peu avant de déclencher l’assaut sur Santa Clara, le Che se rendit dans un petit cabanon. Il en ferma la porte, s’isolant des trois-cents guérilleros qui l’accompagnaient, et abattit à trois reprises la crosse de son fusil sur le sol de terre battue. Peu après, une créature difforme et verdâtre fit son apparition et se prosterna devant le chef révolutionnaire.
— Tu es à l’heure. Si tu es prêt à payer le prix, je respecterai le pacte, grinça le gremlin dans un mauvais sourire.
— Je paierai, pour la victoire contre Batista. Mais je veux savoir pourquoi. Après tout, il devrait y avoir suffisamment de victimes dans les prochains jours pour combler tes appétits de mort !
Le gremlin se pourlécha les babines d’un air gourmand.
— Laisse-moi te détromper : je ne me nourris pas de la mort, je me délecte de la peur qui précède la fin de la vie. C’est pourquoi j’ai besoin d’exécutions, idéalement de personnes jeunes et innocentes. De temps en temps, cependant, je me contenterai de la terreur d’un vieux salopard face à sa propre mortalité. En échange, je m’occuperai des soldats qui défendent ton ennemi : ils ne sauraient s’opposer à tes compagnons et la victoire sera tienne.
— Comment justifier le meurtre d’innocents ?
— Tu diras cette simple phrase, qui aura le pouvoir de calmer tes détracteurs éventuels : « Quand tu doutes, exécute. »
Le Che hocha la tête, pensif. Déjà, les paroles du gremlin se frayaient un chemin dans son esprit et produisaient l’effet recherché : achever de transformer l’homme en une machine à tuer, pour le plus grand plaisir de Gashanark dit « le verdâtre ».
28 décembre 1958 : prise de Santa Clara (Cuba)